La République du Centre

[lang_fr] bruno da Todi : des séductions et des tourments
Tourmenté bruno … séduisant bruno …

Des haillons aux pendus de Damas, en passant par deux massacres, quelques veuves et au moins une crucifixion, l’itinéraire de bruno da Todi passe par de douloureuses et mystiques angoisses. Mais que de charme pour le dire …
Car tout y est, la couleur, la chaleur intime, une matière souvent attirante comme la céramique et l’intelligence avec laquelle le peinte se sert de matériaux extérieurs, sable, tissus, la sûreté de goût, la palette riche, ce plaisir de peindre qui en est également un pour qui regarde. On est forcément séduit…

Cette dualité surprendra sans doute, tant il est vrai que les jumelages ont beaucoup à nous apprendre et d’abord combien les tréfonds de notre âme peuvent différer, à partir d’inquiétudes, de révoltes identiques. Une tuerie arracherait aux hommes du Nord des accents d’un expressionnisme désespéré. Les pantins de bruno da Todi culbutent et meurent en beauté, dans des accords chaleureux et presque joyeux. Et pour être douloureux, le peintre n’oublie aucun souci de qualité visuelle…
Cette œuvre qui porte en soi, dans la manière, tout un héritage, fait volontiers sienne des acquis beaucoup plus contemporains, et cette synthèse est d’un excellent ouvrier qui maîtrise parfaitement ses moyens. L’intérêt de cette exposition est dans la solidité de la facture, dans la qualité technique, dans l’unité.
Les haillons de bruno da Todi appartiennent à la symbolique de l’œuvre même. A la limite toutefois, le concept prend un caractère purement descriptif, ce qui ne fera pas forcément l’unanimité : il y a là matière à débat. Mais cette incorporation, comme d’autres très élaborée, très intégrée à la toile, s’appelle quand même le talent : bruno da Todi n’en manque pas.
Les 26 toiles qu’il a amenées – une production de deux ans – nous apportent de lui l’image d’une personnalité tout en nuance, frémissante en même temps que d’un peintre très à l’aise dans ce style du moins. Une production qui, à la faveur de certains thèmes – le monde en formation – se situe très au-delà des frontières du figuratif et définit, extérieurement à toute pensée, à toute intention, les bases mêmes de la sensibilité de ce peintre attachant, très doué, et avec lequel nous avons eu plaisir à faire ainsi longuement connaissance. Même si nous avons peu parlé : la peinture en dit tellement plus … R.R.